Alors qu’ils représentent 53,4% de la population mondiale, les pays membres des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) parviennent difficilement à consolider cette alliance.

 
 

brics-image-du-domaine-public
De gauche à droite : le président brésilien Michel Temer, le président russe Vladimir Poutine, le Premier ministre indien Narendra Modi, le président chinois Xi Jinping et le président sud-africain Jacob Zuma au 8ème sommet des BRICS à Goa, Inde, le 16 octobre 2016. Image du domaine public.

 

Le 8ème Sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) s’est tenu les 15 et 16 octobre 2016 dans l’État de Goa, dans l’ouest de l’Inde, sous le thème « Construire des solutions réactives, inclusives et collectives ». Il y a huit ans les cinq pays se sont réunis pour former un bloc contre la puissance américaine. Lors du 8ème Sommet, le président brésilien Michel Temer, le président russe Vladimir Poutine, le Premier ministre indien Narendra Modi, le président chinois Xi Jinping et le président sud-africain Jacob Zuma ont renforcé leur volonté de contrer cette domination économique, militaire mais aussi géopolitique en abordant des enjeux internationaux comme le conflit israélo-palestinien, la situation en Syrie ou en Afghanistan. Alors que l’Inde espère améliorer ses relations avec les Israéliens sans mettre de côté son soutien envers la cause palestinienne, « la Chine et la Russie occupent des positions similaires sur les questions internationales et régionales les plus importantes, y compris sur la Syrie et l’Afghanistan», a déclaré le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Li Baodong. Cette position commune est liée aux idéologies économiques et sécuritaires de chacun. En échangeant avec le Gouvernement de Kaboul ainsi qu’avec les Talibans, la Russie établit une défense de ses intérêts nationaux. Une lutte contre le terrorisme mais également contre la drogue provenant de cette région. Moscou a plusieurs fois affirmé sa position face au trafic massif de stupéfiants et a décidé d’agir directement en Afghanistan. Pour la Chine, il s’agit également de défendre sa sécurité intérieure tout en protégeant ses enjeux économiques. La Chine et la Russie sont très attachées au projet chinois « Ceinture économique de la route de la Soie ». Pendant le 8ème sommet des BRICS, l’un des objectifs principaux était de discuter de l’intégration de l’Union économique eurasiatique (UEE : Russie, Arménie, Bélarus, Kazakhstan et Kirghizstan) à cette résurrection commerciale. Car si plusieurs projets d’infrastructures sont en cours dans l’UEE, le chemin est encore long. La stabilité de l’Afghanistan et de l’Asie Centrale en général est donc primordiale pour ses voisins chinois et russes. Dans la Déclaration de Goa, document qui clôture cette réunion annuelle, les BRICS ont également exprimé leur satisfaction quant à l’approbation par la Nouvelle banque de développement (NDB) d’une première série de prêts notamment destinés à financer des projets d’énergies renouvelables au sein des BRICS.

 
 

Entre récessions et ambitions

 

En 2001, l’économiste de la banque d’investissement Goldman Sachs, Jim O’Neill, créait l’acronyme BRIC pour désigner les pays émergents de l’époque. Dix ans plus tard, l’Afrique du Sud venait rejoindre l’équipe censée devenir une future puissance mondiale. Si les BRICS ont triplé leur produit intérieur brut (PIB) en 15 ans, l’étude de Goldman Sachs prévoyant une part de 40% de la croissance de l’économie mondiale en 2025 semble difficilement atteignable. Même Jim O’Neill notait début 2015 que le concept risquait de devenir désuet dans les cinq années à venir et vient de fermer son fonds BRICS. Pour cause, un manque d’actions concertées et des récessions. Alors que le Brésil croule sous les scandales et subit ses choix économiques, la Russie déplore la chute des cours du pétrole qui assure 20% de ses revenus. Quant à la Chine, si le National Bureau of Statistics of China (NBSC) a annoncé que la progression du PIB chinois a atteint son plus bas niveau depuis 2009 (7,3%) sur la période allant de juillet à septembre 2014, les spécialistes occidentaux suspectent un ralentissement de la Chine bien plus retentissant. Un an plus tard, la dévaluation du yuan, la chute de la bourse de Shanghai et la perte considérable des réserves de change semblent confirmer cette théorie. Et alors que l’Afrique du Sud ne parvient pas à se démarquer, l’Inde est la seule bonne élève et affiche une croissance de 7,6% de son PIB sur l’année fiscale 2015-2016 se terminant au 31 mars selon le Central Statistical Office de Delhi.

 
 

Des institutions financières alternatives

 

Ceux que le New York Times a surnommé les « cinq fragiles » n’ont cependant pas dit leur dernier mot et misent énormément sur la Nouvelle banque de développement (NDB) dont le siège est à Shanghai. Créée par les cinq pays membres en juillet 2015, elle détient un capital de 100 milliards de dollars. Si la NDB sert à financer les grands travaux des BRICS, c’est également une manière de se réaffirmer contre la puissance de la Banque mondiale et du FMI. Lors du 8ème sommet des BRICS, le Premier Ministre indien Narendra Modi a rappelé la volonté commune des pays « d’accélérer la mise en place d’une agence de notation ». Une démarche supplémentaire pour faire face au monopole des États-Unis puisque le marché de la notation est à 90% aux mains d’un trio américain composé de Standard and Poor’s (S&P), Moody’s et Fitch. Les BRICS commencent à comprendre que leur manque de concertation est l’une de leur principale faiblesse. Des alliances internes sont en effet indispensables à la réussite de leurs objectifs communs. Samedi 15 octobre 2016, lors du 8ème sommet des BRICS, le président russe Vladimir Poutine et le Premier ministre indien Narendra Modi ont conclu des contrats de plusieurs dizaines de milliards de dollars dans la défense et l’énergie.

 
 

L’alliance des BRICS demeure cependant fragile et l’Inde, force notable de la coalition, semble s’en détacher de plus en plus au profit d’un rapprochement avec les États-Unis. Si la puissance américaine est l’ennemi commun des BRICS, le Premier ministre indien Narendra Modi ne se cache pas de sa bonne entente avec le président américain Barack Obama (quatre visites en deux ans).

 
 

Sarah Belnez pour Sereni Magazine.